Pour la petite histoire...
Voilà maintenant 3 ans que j'ai une tendresse particulière pour ce parc d'attraction qui a suscité bien des polémiques lors de son implantation en France. Mon fils avait 2 ans et demi lorsque nous y sommes allés ensemble pour la première fois. Séparée de son père depuis déjà un an et demi à l'époque, je traversais une période sombre où rien ne me semblait fonctionner de façon fluide, notamment les relations avec mon fils. De fait, il traversait, lui aussi, un moment trouble de son histoire, le bonheur des enfants étant, malheureusement, étroitement lié à celui de leurs parents, et plus particulièrement à celui de leur mère à cet âge. Bref, nous nous étions perdus de vue avec mon fils, et cela même si nous vivions sous le même toit. Disneyland Paris a été le lieu de nos retrouvailles, c'est pourquoi je suis difficilement objective en ce qui concerne cet endroit que je juge depuis comme un véritable Éden familial. Probablement l'équivalent de ce que sont Paris et Venise aux amoureux.
Cela dit, mon contexte personnel étant ce qu'il était à l'époque, je pense que ce parc a réellement été pensé pour que chacun y passe un moment exceptionnel de communion en famille et j'ai plusieurs raisons objectives d'affirmer cela.
Politically correct
Tout d'abord, personne n'est oublié à Disney : à l'entrée du parc, on vous loue, au choix, des poussettes ou des fauteuils roulants pour les personnes handicapées, âgées ou obèses. Les restaurants proposent des menus végétariens et, par ailleurs, tout est ultra sécurisé et même les enfants kamikazes n'ont aucun risque de se faire mal nulle part. Enfin, tout ce qu'on y voit est labellisé "politiquement correct", ce qui, je dois l'avouer est plutôt agréable lorsque l'on se balade avec des petits, habitué à passer devant des kiosques à journaux qui rivalisent avec la vitrine d'un sex shop. Le parc ayant été conçu sur le même modèle que ceux de Floride et de Californie, on sent l'influence, pour le coup hautement bénéfique, des lobbies des minorités au sein d'une société procédurière. Car c'est ainsi que les droits de chacun sont respectés aux USA, grâce à la pression des lobbies qui réclament des lois spécifiques, en faveur de chaque groupe. Ce modèle a ses limites mais, à l'heure où les français se posent la question de la discrimination positive, force est de constater que la démarche américaine repose sur le respect des individualités et a porté ses fruits en terme d'intégration, tout du moins, dans le monde du travail. À ce propos, la première fois que j'ai vu des enfants handicapés à la télévision qui étaient là en tant "qu'enfants comme les autres" et non en tant "qu'handicapés", c'était dans une émission américaine, appelée "Sesame Street". En France, le seul moment où l'on peut apercevoir ces minorités, c'est lors du Téléthon. No comment.
All inclusive
À Disney, on en a pour son argent. Et j'adore ce concept typiquement américain de l'assiette qui déborde versus la cuisine nouvelle européenne, très jolie, mais tellement frugale.
L’entrée des 2 Parcs est certes très chère, mais il faut envisager une journée à Disney comme un événement exceptionnel, à renouveler tous les 3-4 ans par exemple. Surtout que, là-bas, chacun peut se contenter de payer son entrée puis passer une journée de bonheur à volonté sans débourser un centime de plus. Ce cas de figure est totalement illusoire, je vous le concède, étant donné la présence massive de tout le merchandising siglé Walt Disney, mais théoriquement, c'est possible.
Venezdonc un matin à l’ouverture, vers 10h et repartez le soir (en été) à 23h00, vous saurez pourquoi vous avez décaissé 59 euros par adulte et 51 euros par enfant. Sans compter les tarifs spéciaux qui sont nombreux… Sur place, vous pouvez manger dans l’un de leurs nombreux fast-foods hors de prix ou aussi emmener votre pic-nique et vous installer sur l’une des nombreuses tables de leurs restaurants qui ne sont pas réservées qu’aux personnes qui consomment. Et là, avouez que, dans n'importe quel café de France, il est impossible de venir «avec son manger».
Sachez toutefois que les RER en direction de Paris ne sont pas réglés exactement sur les horaires du parc (une hérésie de la SNCF) et qu'il vaut mieux prévoir de partir à 23h pétantes pour ne pas louper le dernier, ce qui ajouterait une note de taxi assez salée à l'addition.
Revenons aux parcs en eux-même… Ils sont d’une beauté et d’un gigantisme qui a de quoi séduire tous les rêveurs, et je ne trouve aucunement qu’il s’agisse là d’un imaginaire limité car ces parcs sont aussi vastes que les étendues de l’ouest américain. En plus, l’univers du génie Walt Disney est tellement prolixe que chaque recoin de ces parcs recèle de souvenirs d’enfance pour chacun : la féérie de Blanche-Neige, le cynisme de Pinocchio, la mécanique de Cars… Bref, les mythes disneyiens sont tellement nombreux qu’il faudrait une ville de la taille de Paris pour tous les mettre en scène.
Par ailleurs, chaque détail, chaque brin d’herbe est entretenu comme si les enfants allaient se mettre à 4 pattes aux 4 coins du parc pour inspecter l’état de la végétation et des décors en carton-pâte.
Aucune fausse note dans l’accueil non plus. Je ne sais pas par quel super manager de choc à l’américaine ils sont tous briefés, je ne sais pas non plus combien ils sont, des armées entières, mais tout les gens qui travaillent chez Disney sont extrêmemment souriants, « friendly » et ils semblent prendre un véritable plaisir à être là . D'ailleurs, la question n’est pas là de savoir s’ils sont heureux de gagner le SMIC pour transpirer dans un costume de Winnie l’Ourson, la question est de savoir s’ils ont l’air d’être heureux. Effet particulièrement réussi, au pays de l’illusion érigée comme service ultime.
Enfin, à Dinseyland, il y en a vraiment pour tous les goûts, avec des manèges qui s'adressent aux enfants dès un an et demi jusqu'aux montagnes russes qui séduisent les ados en recherche de sensations fortes. 4 univers superbes, chacun dans leur genre, au sein du parc principal : le monde des contes de fées pour les filles, l'ouest américain pour les garçons et les adultes adorateurs de Mark Twain -un espace qui prend toute sa dimension lors de la fête d'Halloween avec des épouvantails à tête de citrouille qui évoquent l'univers des red-necks* et du KKK**-, l'univers des inventions et de la science fiction, avec son traité original façon début du 20e siècle, son Star Tour et son fameux Space Mountain (la pièce maîtresse du parc) et le monde, un peu hétéroclite il faut le dire, de l'aventure où se mèlent décors pseudo orientaux et bateaux de pirates. Il y a aussi le second parc, qui s'est largement étoffé ces dernières années, et qui restaure un magnifique Hollywood des années 50, à vous faire regretter d'avoir vendu les albums d'Elvis de vos parents sur e-bay.
Bien sûr, avec cynisme, on peut dire qu'il s'agit de prêt-à-rêver, de fast food de l'imaginaire. Certes. Mais justement, cette mise à disposition d'un cadre onirique et d'activités pré-machées permet aux parents de se concentrer sur leur relation avec leur enfant, là où ils passent habituellement leur temps et leur énergie à organiser, inventer, créer et innover en matière de distractions pour leur progéniture. Quant à l'effet sur les enfants, il est incontestable : ils entrent et ressortent bouche bée de cet endroit qu'ils n'imaginaient même pas exister. Sans compter la gratitude indéfectible qu'ils auront par la suite à l'égard de ceux qui les ont emmené au Paradis des petits...
À Disneyland, toutes les conditions sont donc réunies pour passer une journée, sans nuage, consacrée à la relation familiale et à la communion sur des manèges conçus, dans leur majorité, pour "vivre des choses ensemble".
Pour une expérience de symbiose totale et parfaitement mystique, je vous recommande toutefois d'éviter le parc au mois d'août, où vous vous retrouverez avec 3 fois plus de visiteurs que le reste de l'année et des files d'attente d'une heure à chaque manège. C'est, certes, l'occasion de discuter avec votre progéniture mais votre patience pourrait être entamée et une quinzaine de minutes d'attente, c'est largement suffisant pour se faire la conversation, laisser monter l'euphorie et, surtout, profiter de la décoration environnante car, comme rien n'est laissé au hasard, il y a toujours des choses à admirer lorsque vous faites la queue chez Disney.
La Tour de la Terreur
La toute dernière attraction en date est une vraie réussite, il faut le dire. "The Hollywood Tower Hotel" est un superbe immeuble Art Déco qui a été carbonisé par la foudre au niveau de son 13e étage. La mise en scène, à l'intérieur, est toute aussi parfaite. Aucune fausse note dans le mobilier années 50, recouvert de toiles d'araignées et joliment patiné puisque vous êtes dans un hôtel désaffecté depuis près de 50 ans. Avec un peu de chance, vous pouvez même être reçu par le groom qui apparait sur les affiches publicitaires pour cette attraction en ce moment. Un petit film vous raconte l'histoire de ces stars d'Hollywood venues séjourner ici et frappées par la foudre lorsqu'elles étaient dans l'ascenseur au niveau du 13e étage. Vous entrez ensuite dans ledit ascenseur et là, par un effet spécial étonnant, votre image dans le miroir disparait... Vous êtes entré dans la 4e dimension, la "Twilight zone" et vous voilà prêt à décoller pour le grand voyage.
Dans un vaste mouvement masturbatoire, l'ascenseur vous propulse tout en haut de la tour pour ensuite se laisser retomber 13 étages plus bas. Vous décollez de votre siège dans une chute vertigineuse, puis vous recommencez : en haut, en bas, en haut, en bas... Proprement masturbatoire, d'autant que vous êtes dans le noir, la plupart du temps. Cette sensation de jouissance individuelle prend tout son sens lorsqu'elle est partagée avec les siens, assis juste à côté.
J'étais toutefois fort mal à l'aise d'avoir croisé dans la file d'attente un petit garçon d'environ 9 ans, seul. Forcément seul. Rondouillet et très bavard, il me racontait qu'il faisait cette attraction pour la 18e fois (de la journée ?). Cette déclaration m'a immédiatement procuré un sentiment de mal-être. On étaient ses parents ? Je réalisais que, même chez Mickey, il y avait des enfants abandonnés. Et, surtout, je me souvenais alors qu'ils étaient légion en dehors de ces murs enchantés. Ce petit garçon, rond d'avoir mangé pour se remplir d'une mère qui n'est pas là, bavard pour mettre à distance la souffrance avec ses mots, s'était fait hypnotiser par ce grand mouvement masturbatoire de la Tour de la Terreur. Car lorsqu'une mère est absente, il faut bien se procurer seul les émotions qu'elle n'est pas en mesure de dispenser. La masturbation compulsive est un exutoire pour ceux qui ont vécu un abandon, réel ou symbolique, une façon de survivre à l'absence de relation originelle.
Mickey, le grand fédérateur, détourné en objet de plaisir narcissique, ironique, n'est-ce pas ?
Je ne sais pas si la Tour de la Terreur, comme le Space Mountain, ont été conçus aussi dans le but de satisfaire les enfants en manque de sensations maternelles, peut-être bien... Ils pensent à toutes les minorités ces américains.
En attendant, si vous passez par Disneyland Paris, venez au moins vivre une fois l'expérience de la Tour de la Terreur et admirer, à plusieurs de préférence, la magnifique vue sur tout le parc lorsque l'ascenseur vous aura hissé jusqu'au sommet.
* Red-neck : littéralement "cou rouge", c'est ainsi que l'on appelle les paysans de l'Amérique profonde (Texas, par exemple), dont le cou a été rougi par le soleil dans les champs, autrement dit, les ploucs réactionnaires du vieux sud (Texas).
** Initiales de Ku Klux Klan et je ne vous fait pas l'affront de vous expliquer de quoi il s'agit.
Dissolvent Adbusting by Vermibus
Il y a 12 ans
7 commentaires:
Mickey est donc un père d'adoption !
Pas vraiment... C'est plus triste que ça, Mickey serait plutôt une poupée gonflable, symptôme d'une incapacité à l'altérité (sic)
Excuse-moi Fil d'utiliser des mots aussi bizarres mais je ne sais pas comment le dire autrement.
Mais dis moi... Est ce que le ketchup est servi à volonté ?
Bien sûr Boibinette ;-)
Hey oh, c pas avec un mot comme "altérité" que tu vas impressionner ton alter ego !
:p
ben dis donc, je te lis en entier et avec plaisir. Rien avoir avec une lettre BT. Bravo Poulette !
Merci Marlor
Mais quand même, quand je pense à toutes ces lettres ING Direct où je t'avais caché des petits mots doux que t'as jamais lues...
Enregistrer un commentaire